Une perfusion bien prescrite, c’est une administration sécurisée du traitement, une logistique fluide et moins d’« aller-retour » entre soignants, pharmacie et prestataire. À l’inverse, une ordonnance incomplète peut retarder la prise en charge, augmenter le risque d’erreur et exposer le patient à des complications. Comment formuler correctement une prescription de set de perfusion, à l’hôpital comme au domicile ? Voici un guide pratique, précis et opérationnel pour rédiger une ordonnance conforme et exploitable par tous les intervenants.
Quand prescrire un set de perfusion — et lequel choisir ?
Le set de perfusion (tubulure, chambre compte-gouttes, connecteurs, dispositifs de clampage, filtres éventuels) est le circuit qui relie la poche de solution au cathéter. Le choix dépend du traitement et du contexte d’administration :
- Administration par gravité ou via pompe à perfusion (volumétrique ou pousse-seringue) ;
- Voie veineuse périphérique ou centrale (PICC, cathéter tunnelisé, chambre implantable) ;
- Nature du produit perfusé : solutés standards, antibiotiques IV, immunoglobulines, nutrition parentérale (NPT), anticancéreux, etc. ;
- Contraintes particulières : photosensibilité, nécessité d’un filtre, matériau sans DEHP/latex, longueur de ligne, connectique Luer-lock.
À noter : les poches de sang et dérivés utilisent un dispositif spécifique de transfusion (avec filtre 170–200 µm), différent des sets de perfusion de médicaments et de solutés. Ne pas confondre.
Les éléments indispensables sur l’ordonnance
1) Identification et cadre
- Identité du patient (nom, prénom, date de naissance) et, si possible, numéro d’identification hospitalier.
- Identité du prescripteur (nom, spécialité, coordonnées, numéro RPPS), date et signature.
- Contexte d’administration : hospitalisation, HAD, domicile avec PSAD, ambulatoire.
2) Voie d’abord et indication clinique
- Type de voie veineuse : périphérique (VVP) ou centrale (PICC, chambre implantable, etc.).
- Indication de la perfusion : antibiothérapie IV, hydratation, NPT, immunoglobulines, chimiothérapie, analgésie, etc.
- Particularités cliniques pertinentes : risque infectieux, besoin de filtre, photosensibilité du produit, allergie au latex.
3) Description précise du set de perfusion
Décrire le dispositif attendu évite les substitutions inadaptées. Précisez :
- Mode d’administration: set pour gravité ou compatible pompe à perfusion (volumétrique/pousse-seringue).
- Connectique: Luer-lock indispensable si chambre implantable ou pompe ; préciser si Luer mâle/femelle, sites d’injection additionnels (ports en Y, membrane à injection, valve bidirectionnelle).
- Filtration: filtre 0,2 µm (solutés aqueux sensibles), 1,2 µm (émulsions lipidiques, NPT 3-en-1) — selon protocole et RCP du produit. Ne pas utiliser ces filtres pour les transfusions (set dédié).
- Longueur et diamètre de tubulure: p. ex. 150 cm, faible compliance pour pompe.
- Éléments fonctionnels: chambre compte-gouttes graduée, clamp à roulette, valve anti-reflux si requise, bouchon obturateur stérile.
- Matériaux: sans DEHP, sans latex si allergie ou si traitement sensible ; tubulure opaque si produit photosensible.
- Stérilité et usage unique: « stérile, à usage unique » à préciser.
- Conformité: marquage CE, conformité aux normes ISO de l’équipement d’infusion (ex. série ISO 8536).
4) Paramètres d’administration
- Produit(s) perfusé(s): DCI, dosage, volume de chaque poche, compatibilités si administration en Y.
- Débit et durée: mL/h, durée par poche, volume à perfuser (VAP) et, au besoin, vitesse maximale.
- Fréquence: nombre de poches/jour, jours de traitement, schéma hebdomadaire et durée totale.
- Changement de ligne: selon protocole institutionnel et fabricant (par ex. 24 h pour lipides et nutrition parentérale, 24 h pour sang/dérivés, 72–96 h pour solutés aqueux — à adapter aux recommandations locales).
5) Administration à domicile (si applicable)
- Mention du recours à un prestataire de santé à domicile (PSAD) et des infirmiers(ères) libéraux(ales) impliqué(e)s.
- Matériel complémentaire: pompe, prolongateurs, aiguilles Huber (chambre implantable), antiseptiques, compresses stériles, gants, conteneur DASRI, etc.
- Formation/consignes: purge de la ligne, protection de la tubulure, gestion des alarmes, conduite à tenir en cas d’extravasation, fièvre ou réaction d’hypersensibilité.
- Coordonnées d’urgence (médecin prescripteur, service de garde, PSAD).
Deux exemples d’ordonnance commentés
Exemple 1 — antibiothérapie IV à domicile via pompe
Contexte: patiente de 68 ans, VVP, céftriaxone 2 g/j pendant 10 jours, administration quotidienne en ambulatoire.
- Voie: périphérique (VVP).
- Set de perfusion: compatible pompe volumétrique, connectique Luer-lock, longueur 150 cm, chambre compte-gouttes, clamp, 1 site d’injection latéral, matériau sans DEHP, stérile, usage unique.
- Filtration: filtre 0,2 µm intégré (selon protocole établissement).
- Paramètres: dilution dans 100 mL NaCl 0,9 %, débit 200 mL/h (30 minutes), 1 poche/j, durée 10 jours.
- Changement de tubulure: toutes les 72–96 h selon protocole PSAD/fabricant.
- Matériel associé: pompe volumétrique, obturateurs stériles, compresses stériles, CHG alcool, gants non poudrés, conteneur DASRI.
- Suivi: IDEL 1 passage/j, surveillance point de ponction, température, signes d’extravasation, tolérance.
Exemple 2 — nutrition parentérale (NPT) avec émulsions lipidiques
Contexte: patient de 57 ans, voie centrale (PICC), perfusion nocturne quotidienne.
- Voie: centrale (PICC).
- Set de perfusion: compatible pompe volumétrique, faible compliance, Luer-lock, longueur 200 cm, 2 sites d’injection latéraux, valve anti-reflux, tubulure opaque (photosensibilité), stérile, usage unique.
- Filtration: filtre 1,2 µm pour préparation « 3-en-1 » lipidiques (ou 0,2 µm si mélange sans lipides, selon protocole nutritionnel).
- Paramètres: perfusion 12 h nocturnes, débit programmé selon prescription de la NPT (ex. 1800 mL sur 12 h = 150 mL/h).
- Changement de tubulure: toutes les 24 h.
- Matériel associé: pompe, prolongateur pour PICC, bouchons désinfectants, CHG alcool, film transparent stérile, DASRI.
- Suivi: IDEL pour branchement/débranchement, pesée hebdomadaire, surveillance du point d’insertion et du débit.
Points de vigilance et erreurs fréquentes
- Oublier de préciser la connectique Luer-lock pour chambres implantables et pompes: risque de déconnexion et de fuite.
- Ne pas indiquer le type de filtre: la taille (0,2 µm vs 1,2 µm) dépend du produit; un filtre inadapté peut obstruer ou laisser passer des particules indésirables.
- Négliger la photosensibilité: certaines molécules exigent une tubulure opaque ou un manchon protecteur.
- Incompatibilités en Y: préciser si administration dédiée ou alternée; en cas de doute, privilégier une ligne exclusive.
- Omettre les paramètres d’administration: le débit et la durée doivent être écrits noir sur blanc (pas de « à adapter »).
- Changement de ligne non planifié: mentionner la fréquence de renouvellement selon protocole et fabricant.
- Matériau inadapté: choisir des sets sans DEHP/latex si nécessaire (patients à risque, médicaments sensibles aux phtalates).
- Confusion avec les dispositifs de transfusion: les poches de sang nécessitent un set spécifique; ne pas utiliser une tubulure standard.
Réglementation, traçabilité et remboursement
- Conformité: exiger un dispositif portant le marquage CE et conforme aux normes applicables (ex. ISO 8536 pour les équipements d’infusion à usage unique).
- Traçabilité: au moment de la pose, relever le numéro de lot et la date de péremption de la tubulure; conserver la vignette/étiquette si disponible dans le dossier patient/feuille de traçabilité.
- Remboursement en France: à domicile, l’approvisionnement passe souvent par un PSAD sur la base d’une prescription mentionnant le dispositif, la durée et le protocole de soins. Vérifier les conditions de prise en charge (LPPR) avec le pharmacien/PSAD; les pratiques varient selon les situations cliniques et l’assureur.
- Bonnes pratiques: respecter les recommandations locales pour la fréquence de changement des lignes, l’antisepsie (solution alcoolique de chlorhexidine le plus souvent) et la gestion des déchets d’activités de soins à risques infectieux (DASRI).
Checklist express à copier-coller dans l’ordonnance
- Patient: identité + date de naissance
- Voie: VVP / PICC / chambre implantable / autre
- Produit(s) perfusé(s): DCI, dose, volume, compatibilités
- Mode: gravité / pompe volumétrique / pousse-seringue
- Set de perfusion: longueur (… cm), Luer-lock, sites d’injection (… ports), chambre compte-gouttes, clamp, valve anti-reflux (oui/non)
- Filtre: 0,2 µm / 1,2 µm / sans (selon protocole)
- Matériau: sans DEHP, sans latex si allergie; tubulure opaque si photosensibilité
- Paramètres: débit (… mL/h), durée (… h), VAP (… mL), fréquence (…/jour), durée du traitement (… jours)
- Changement de ligne: toutes les … h selon protocole/fabricant
- Domicile (si applicable): PSAD, IDEL, matériel associé, consignes, numéros d’urgence
- Prescripteur: nom, RPPS, contact, date, signature
Conclusion
Rédiger une ordonnance de set de perfusion ne se limite pas à écrire « tubulure standard ». Décrire le mode d’administration, le type de filtre, la connectique, les matériaux, la longueur, les paramètres de débit et la fréquence de changement sécurise le geste et clarifie les responsabilités de chacun. Une prescription précise fluidifie le circuit de soins, diminue le risque d’erreurs et évite les retards de traitement, que ce soit en service hospitalier, en HAD ou au domicile.
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